Barry Long, est un auteur contemporain, décédé au début du XXIème siècle à 77 ans. Il s’est exprimé avec conviction , en termes très toniques, sur l’approche non duelle de la vie initiatique. Ses ouvrages sont dynamisants. Ils stimulent la réflexion et réveillent la conscience.
Avec beaucoup de clarté, il distingue : l’humanité (qu’il aime et respecte) du monde (qu’il déteste). L’une est la création directe de Dieu, l’autre celle de l’ego ! Barry Long ne mâche pas ses mots, il s’exprime toujours en termes directs, à partir de convictions très affirmées et confrontantes…
Il paraîtrait qu’Eckhart Tollé se serait inspiré de ses enseignements, lorsqu’il a écrit son best seller international : « Le pouvoir du moment présent ».
Biographie de Barry Long
Né et élevé en Australie, il exerça d’abord en tant que journaliste, avant de partir en Inde pour sa queste spirituelle personnelle. Il n’y rencontra pas un maître mais s’est senti reconnaissant envers Krisnamurti, qui l’aurait inspiré.
Très marqué par l’amour mystique de femmes qui l’ont profondément marqué, il enseignait la méditation dans une perspective non duelle.
Il se disait également proche du tantrisme dans son approche de l’amour.
Son charisme lui a valu un succès international, et ses séminaires de deux semaines étaient bien remplis.
Ses livres les plus connus sont les suivants :
- La Méditation, cours de base en dix leçons (petit manuel, très pratique et précis)
- Stillness is the Way (excellent, mais non traduit en Français à ce jour)
- Intuitions sur l’origine
- Faire l’amour de manière divine (excellente approche de la sexualité et de l’amour, ne mâchant pas ses mots)
- Seule meurt la peur
- et une dizaine d’autres livres traduits en plusieurs langues
Au passage, Barry Long a enregistré des vraies perles à propos de l’art d’arrêter de penser et de revenir à l’état de disponibilité. C’est en anglais, tant qu’un éditeur ne l’aura pas ré-enregistré en Français, mais Barry Long parle très distinctement et sa voix est d’une grande clarté. Plusieurs de ses conférences sont disponibles en audio sur un site qui lui est dédié.
Barry Long s’est refusé à fonder une école avec des successeurs qui parleraient en son nom (et voici le début de la secte…). Au contraire, il a encouragé chacun à parler par soi-même depuis sa propre expérience.
Les extraits ci-dessous sont tirés de l’ouvrage de Barry Long : « Seule meurt la peur » – Les Éditions du Relié
La fable du masque social
Voici la traduction d’une métaphore de Barry Long, qui illustre le rapport entre notre être profond et notre fausse identité, la personnalité.
Ce texte court est une autre manière d’évoquer la même chose que l’allégorie de la caverne de Platon, dont nous avons déjà parlée.
« Il y a très, très longtemps, lorsque les êtres humains n’étaient pas incarnés dans leur corps physique comme ils le sont aujourd’hui, un homme (où était-ce une femme ?) avait fabriqué un masque merveilleux – un masque qui pouvait avoir plusieurs visages.
Cet homme avait l’habitude de mettre son masque et de s’amuser en accostant soudainement les passants et en observant leurs réactions. Parfois, le masque souriait, parfois il pleurait, parfois même, il grimaçait et se renfrognait.
Ses victimes étaient toujours choquées à la vue de ce visage tellement extraordinaire, étrange et si peu naturel – même lorsqu’il souriait. Mais que ces personnes rient ou pleurent était sans importance pour notre homme. Tout ce qu’il voulait, c’était l’excitation due à leurs réactions. Il savait bien que c’était lui derrière le masque. Il savait que le farceur, c’était lui – et que la farce était à leurs dépens.
Au début, il sortait avec le masque deux fois par jour. Puis, s’habituant à l’excitation que lui procurait cette activité, et en en voulant encore davantage, il commença à le porter toute la journée. Finalement, il n’éprouva plus le besoin de l’enlever et le garda pour dormir.
Durant des années, l’homme parcourut le pays en s’amusant derrière son masque.Puis un jour, il s’éveilla avec une sensation qu’il n’avait jamais ressentie auparavant – il se sentait seul, divisé, quelque chose lui manquant. Bouleversé, il bondit hors de chez lui pour se trouver face à une très belle femme – et en tomba immédiatement amoureux. Mais la femme cria et s’enfuit, choquée par ce visage étrange et effrayant.
« Arrêtez-vous, ce n’est pas moi ! » cria-t-il en tordant son masque pour l’arracher. Mais c’était lui. Impossible de détacher le masque. Il était collé à sa peau. Il était devenu son visage.
Cet homme, avec son masque fabuleux, fut la première personne à entrer dans ce monde malheureux.
Le temps passa. Malgré sa ténacité et les efforts qu’il déploya pour annoncer à tous le désastre qu’il s’était infligé, personne n’était prêt à le croire. D’autant plus que personne n’était intéressé à l’écouter, puisque tout le monde l’avait imité. Tous avaient mis leur propre masque – afin de connaître eux aussi la nouvelle excitation de jouer à être ce qu’ils n’étaient pas. Comme lui, ils étaient tous devenus le masque.
Mais désormais quelque chose de pire était arrivé. Non seulement ils avaient oublié la farce et le farceur, mais aussi ils avaient oublié la façon de vivre joyeusement, en tant qu’être sans masque. »
Cette allégorie exprime la détresse, après l’excitation, que ressentent celles et ceux qui se prennent pour leur personnalité.
Le mot personnalité vient du grec ancien « Per-sona » qui désignait les masques grecs, par lesquels passait le son pour être amplifié. Cela donne une idée de la fausseté de la personnalité, qui n’est qu’un masque social. Il en faut un probablement, mais le problème c’est qu’on s’identifie à lui au point de croire que nous sommes notre masque, ainsi que le suggère l’allégorie de Barry Long.
La personnalité est une agrégation de pièces rapportées, comme l’habit du « bateleur » (voir cette image du tarot des imagiers du moyen-âge).
La symbolique du Tarot indique d’ailleurs que le Bateleur (la personne qui se lance dans la vie horizontale et sociale) a mis son stand à la foire et montre à voir une façade aux badauds. Comme un camelot, il se met en scène pour vendre… Il cherche à éblouir, à capter l’attention, à commencer par la sienne. Comme un cabotin, il s’écoute et s’admire lui-même, se prenant pour l’image que lui renvoient les autres.
Pourtant l’être qui est dans l’habit du bateleur n’est pas ce qu’il montre à voir, de même que vous n’êtes pas votre personnalité. Votre personnalité n’est qu’un assemblage disparate et incohérent de pièces rapportées ça et là au gré des interprétations que vous vous êtes faites inconsciemment à partir des images que les autres vous ont renvoyées de vous-même…
Comme dans un jeu vidéo, où vous finiriez par vous prendre pour le personnage à l’écran, votre avatar, a une certaine antériorité dans cette vie, un caractère lié à sa trajectoire, des possessions, des personnes même dont il s’imagine qu’elles lui appartiennent (ses parents, ses enfants, ses amis…). Mais tout cela est très flou, très peu consistant. Une simple pichenette dans le système et tout s’effondre comme un château de cartes ! Si vous voulez démasquer l’imposture, vous réaliserez que vous n’êtes pas ce personnage, cette personnalité qui ne tient qu’avec de grosses ficelles, pourtant précaires… Mais alors, qui êtes vous vraiment ?
Il vous appartient de vous laisser travailler de l’intérieur par cette question. Et il est possible, qu’il soit impossible d’y répondre avec des mots. En revanche, il vous est déjà arrivé d’en faire l’expérience. Il suffit juste de maintenir le cap…
Pour accéder à qui vous êtes vraiment, et passer par delà le masque social que vous contemplez vous-même, en vous prenant pour lui, il y a plusieurs approches amusantes :
- l’une d’entre elles est de descendre dans vos sensations corporelles, là les pensées n’ont pas accès et votre personnalité est comme désinvestie au profit de votre champ de conscience pure et alerte.
- une autre consiste à vous mettre au spectacle de la beauté, sous toutes ses formes : régalez-vous d’un plat délicieux, admirez un paysage sublime, observez la délicatesse d’une fleur des champs, embrassez vos enfants, caressez votre chat, admirez une oeuvre d’art, écoutez une musique qui vous fait vibrer… Mais soyez ouvert à l’admiration qui émerge, sans la qualifier. Ne commentez rien, restez juste comme suspendu dans la contemplation. Mais quand je dis suspendu, je parle des pensées, pas de vous. Vous , au contraire, enracinez-vous dans la profondeur de l’expérience, toujours sans paroles intérieures
- une autre, un peu plus subtile, consiste à se demander qui se demande « qui suis-je ? ». Ou bien encore, quand je regarde cet objet : qui regarde cet objet ? Ne vous contentez pas de dire « moi » (c’est-à-dire la restriction de vous-même, que vous prenez pour vous.Voyez clairement que « moi » n’est qu’une histoire personnelle, mais qu’une histoire ne peut être « vous »). Laissez-vous un peu « creuser » par cette interrogation, en essayant de retourner votre regard vers vous-même…Essayez d’écouter celui qui en vous écoute, quand vous écoutez. Cette présence qui précède le regard, c’est vous, justement…
- une autre encore, pourrait consister à essayer de quitter qui vous êtes, à essayer d’être ailleurs que là où vous êtes, à tenter de quitter l’instant présent pour aller dans le passé ou le futur sans l’intermédiaire de la pensée. Vous voyez bien que c’est impossible. Vous êtes centré dans qui vous êtes ! En contact par l’intérieur avec qui vous êtes, comme on est adossé à sa chaise à l’arrière du corps, vous ne pouvez pas vous localiser, vous ne pouvez pas vous saisir mentalement, mais vous pouvez sentir depuis qui vous êtes.Vous laissez ainsi libre cours à l’épanouissement d’un vaste champ de conscience pure et alerte… Et si c’était cela que vous êtes vraiment ?
Une autre belle métaphore, de Rupert Spira cette fois, peut nous aider à comprendre que nous ne sommes pas notre personnalité.
Imaginons John Smith, un acteur qui jouerait le rôle du roi Lear de Shakespeare.
On voit bien dans cette situation que le rôle du roi Lear est en quelque sorte superposé à la personne de John Smith. Un peu comme un costume, et que même si l’acteur incarne le personnage de la pièce, il n’est pas ce personnage ! Evidemment : John Smith n’est pas le roi Lear.
Et imaginons maintenant que cet acteur, tellement fasciné par les pensées et les émotions de son personnage dans la pièce, finisse par se prendre pour le roi Lear, pendant quelques jours après la représentation. On le verrait ainsi, misérable, portant les souffrances du personnage. Le pauvre John Smith, accablé de souffrances imaginaires, rencontre alors un ami à qui il se confie de ses problèmes de roi Lear. L’ami lui révèle alors qu’il ne souffre pas réellement de ces problèmes, mais que ce dont il souffre plutôt c’est d’avoir oublié qui il est vraiment : John Smith, qui n’a rien à voir avec les souffrances du personnage de la pièce !
Je trouve cette image excellente, qui montre bien l’écart qu’il y a entre l’être que nous sommes et la personnalité que nous croyons être. Nous nous croyons accablé d’un poids de souffrances, qui ne concernent que le personnage social et le corps, pour lesquels nous nous prenons à tort.
Le devoir d’être heureux !
Dans ce texte, Barry Long apostrophe le lecteur de manière directe.
Comme un boxeur puncheur, il vous assène une série de terribles crochets dévastateurs de l’ego 🙂
Vous n’avez pas le droit d’être malheureux – jamais.
Mais vous pensez avoir ce droit. Ainsi, dans votre ignorance, vous vivez intimement et de plein gré avec le malheur; vous avez fait de lui un partenaire de votre vie. A tout moment, vous avez tendance à être déprimé, morose, soucieux, rancunier, frustré, agité et maussade. On ne peut compter sur vous pour rester longtemps hors de votre malheur. Il vous est plus proche et plus cher que n’importe quel homme, quelle femme ou enfant dans votre vie. Ainsi, il s’insinue régulièrement entre vous et les autres, plongeant même vos plus précieux rapports humains dans la discorde et la dispute. Inébranlable, vous persistez cependant à vivre au travers de vos émotions aiguës et créatrices de trouble, forçant vos proches à les supporter également et ceci, jusqu’au moment où il vous convient à nouveau d’être agréable et gentil . . . jusqu’à la prochaine fois.
L’horreur c’est que vous croyez qu’il est naturel sur terre de vivre de cette façon. Ainsi, vous tolérez vos humeurs sordides et vous les excusez. Et ainsi, par l’exemple qu’ils ont de vous, vous contaminez les enfants avec cette terrible maladie dénaturée. Pendant ce temps, vous croyez être digne d’affection ou mériter que l’on vous aime davantage. Vous êtes irresponsable. Vous déshonorez la vie sur terre. Parce que c’est votre malheur que vous aimez et non la vie.
(…)
II n’y a pas de malheur dans les événements.
Tout malheur réside en vous – dans votre façon de vous accrocher au droit d’être malheureux parce que les choses ont changé, comme elles doivent. Personne ne peut échapper aux événements de la vie. Mais dans l’aveuglement dû à votre état malheureux, vous manquez de voir que les événements qui vous choquent ne sont là que pour provoquer votre éveil et vous faire réaliser la vérité de la vie. Tel est le sens de la vie, celui que vous avez également choisi d’oublier.
Vous avez toujours une bonne excuse pour justifier votre malheur. Vous en rejetez toujours la responsabilité sur quelqu’un ou quelque chose; mais, jamais sur vous-même, qui êtes pourtant le seul à blâmer. La colère couve en vous quant à ce que l’on vous a fait. Vous êtes amer ou vous broyez du noir parce qu’on vous a abandonné, qu’on vous a trahi, qu’on vous a laissé tomber. Ou bien vous êtes inconsolable, accablé de douleur, parce qu’un amant, quelqu’un que vous aimez est mort ou vous a quitté, parce que vous avez perdu votre travail ou votre argent.
C’est ainsi que vivent la plupart des gens. Mais ce n’est pas la vie. Vivre de cette manière-là, en ignorant la vérité de la vie, est traumatisant ou douloureux, parce que toute chose pour laquelle vous vivez est appelée à disparaître, à changer ou à se terminer – alors que vous continuez d’espérer le contraire. Essayer de vivre d’une manière si désespérée, si dénuée de bon sens, voici ce qu’est le malheur.
Vous n’êtes pas juste en train de vivre. Vous êtes la vie.
Vous êtes la vie elle-même, la vie en personne sur cette terre. Et vous êtes la vie en permanence, au-delà des hauts et des bas de votre personnalité – pas seulement de temps en temps. La vie ne change ni ne disparaît. La vie continue. N’y a-t-il jamais eu un moment dans votre vie, où vous n’avez pas avancé, où vous ne vous êtes pas remis même de la crise la plus horrible? Bien sûr que non.
La fin de toute recherche spirituelle
S’adonner à une recherche spirituelle est une perte de temps.
Mais alors, toute l’existence, telle que nous avons à la vivre, est une perte de temps — jusqu’à ce que nous revenions à nos sens.
Plus nous continuons à faire des recherches, moins nous découvrirons la vérité.
La vérité est dans le moment présent; et le moment présent est ce qui est. C’est-à-dire tout est dans la sensation, ce moment-ci, maintenant, dans la propre expérience de l’observateur. C’est la voie de l’ignorance que de chercher quelque chose d’autre.
Pendant que vous serez engagé dans la recherche spirituelle, vous serez détourné de ce qui est, et vous entrerez dans ce que les maîtres spirituels, les bouddhistes et toutes les autres religions ont apporté. Vous entrerez dans l’espace intérieur et vous commencerez à imaginer ce qu’est Dieu, ce qu’est Jésus, ce qu’est Mahomet, ce dont a parlé Bouddha.
Vous entrerez dans toutes sortes de cérémonies, de mantras et choses semblables — qui sont toutes du toc comparées à la vérité.
La seule vérité est ce qui est tel que c’est, dans le moment présent : le phénomène tel qu’il est devant vous.
Tout le reste vous éloigne de la vérité. Et alors, inévitablement, vous devrez souffrir et connaître la confusion et la contradiction.Il vous a été donné de vivre pour que vous puissiez souffrir assez et traverser la perte et tous les succès et échecs, les dépressions et les confusions temporaires ;
et les moments temporaires dans lesquels vous êtes dans l’état d’esprit de sentir qu’il y a un Dieu ou une vérité.
Temporaires, parce que tenir la vérité comme un état ininterrompu exige que vous soyez absolument et complètement dans vos sens, dans le moment présent et à tous les instants.
Vous ne pouvez accomplir cela tant que vous n’avez pas vécu et souffert suffisamment ; de sorte que finalement vous vous débarrassez de votre imagination de la vérité et vous percevez sa réalité.Vous vous attendriez à ce qu’un maître spirituel dise qu’« il n’y a qu’une seule vérité et c’est le moment présent ». Mais je vous dis ceci : la seule vérité est d’être dans le moment présent,
dans vos sens ; ce que vous voyez et que vous entendez est la vérité ; et s’il y a quoi que ce soit qui survient dans votre espace intérieur, ce n’est pas la vérité.L’espace intérieur est le lieu où vous pensez, voulez, imaginez, souhaitez et rêvez ; où vous avez des réalisations spirituelles ; où vous réalisez Dieu, la vérité et l’amour.
Tout cela arrive dans l’espace intérieur — de manière démontrable, dans votre propre expérience. Mais tout ce que vous êtes en train d’imaginer, que vous construisez comme une opinion, une position, n’est pas la vérité. Il n’y a pas de vérité dans l’imagination Et il n’y a pas de vérité dans les réflexions.A l’intérieur de vous se trouve la clameur de vos émotions et l’embrouillamini de votre mental. S’il se trouvait que vous éliminiez un peu de cette confusion et de cette clameur,
alors il est vrai qu’un reflet de la vérité pourrait se faire entrevoir ; et vous seriez exalté dans cet instant et vous penseriez que vous avez réalisé Dieu.
Mais ce n’est qu’un reflet de Dieu. Ce n’est là qu’un éclaircissement d’une petite partie de l’intellect, qui est le reflet de Dieu dans l’existence.
Un reflet de Dieu est comme un reflet dans le miroir. Est-ce vous dans le miroir ? Non, c’est votre reflet. Ainsi, un reflet de Dieu dans l’intellect n’est pas Dieu…
Dieu est maintenant, en ce moment-ci, à chaque moment.L’intellect est tout barbouillé de tout le toc que la croyance et la religion, et les espoirs et les faussetés que les maîtres ont répandus.
Vous ne pouvez pas trouver la vérité tant que vous n’avez expulsé tout cela de l’intérieur de vous. Vous ne trouverez jamais l’absence, qui est l’état de vérité, tant que vous n’êtes pas capable d’être dans le moment présent — sans rien qui survienne à l’intérieur.Dois-je rappeler aux bouddhistes ce qu’a dit le Bouddha ? « Je n’ai rien qui survienne ». Cela signifie : aucune opinion, aucune croyance, aucun mantra, aucun vouloir, aucune tentative,
aucun effort, aucune clameur, aucune confusion — en tant que mode de vie.Que pouvez-vous faire pour éliminer la clameur et la confusion ? Vous devez cesser de réfléchir à partir de vos émotions, de vos pensées, de votre mémoire. Vous devez cesser de penser, de souhaiter, de rêver alors que vous êtes éveillé. Pendant que je fais tout cela, j’existe. J’existe seulement dans le passé — en tant que réflexion à partir de ma mémoire, mes émotions ou ce que je sais. Lorsqu’il n’y a que la perception, dans le moment présent, dans les sens, je disparais. Alors, il y a l’état d’absence — aucune personne, aucun individu. Seulement ce qui est.
C’est là une négation de tout — sauf du faire. Personne sur terre ne peut cesser de « faire ». Le problème est seulement que je produis un « Je » pour réfléchir sur ce que je suis en train de faire.
Il n’y a rien qui survienne. Mais je suis néanmoins encore en train de « faire »… L’oiseau chante et il y a les arbres, le ciel, les nuages, et tout ce dont m’informent mes sens de l’ouïe et de
la vue ; c’est la seule réalité dans le moment présent.
Je ne sais pas à quelle profondeur est cette réalité à l’intérieur des sens. C’est un grand X ou autre chose que je ne puis nommer. Est-ce là tout ce que c’est ? Personne ne peut le dire.
Tout ce qui en est dit est une interprétation. C’est ce qui est ici et maintenant. C’est le mystère; c’est le secret.
Introduction au Cours de méditation en 10 leçons
Cet ouvrage esquisse une méthode de méditation efficace. C’est un livre sur la destruction de soi-même. La méditation est destructrice parce qu’elle dissout graduellement ce qui est faux en vous : le faux moi que vous pensez être mais que vous n’êtes pas. Vous allez découvrir de façon précise en quoi consiste ce faux moi.
Quand le faux est détruit, vous êtes ce que vous êtes.
Ce que l’expression “être ce que l’on est” signifie dépasse toute imagination, et va bien au-delà de tout ce qu’on a jamais pu dire sur le sujet. Cela peut être décrit comme l’apogée, le but suprême de la vie, pour que chacun de vous individuellement puisse en faire l’expérience dès que possible.
(…)
Les leçons qui suivent vous enseignent la façon de commencer à dissoudre votre faux moi, base essentielle pour découvrir la vérité que vous êtes. C’est à cette fin, à cette vérité que vous êtes réellement, que ce livre est consciemment dédié…;
Le premier objectif de la méditation est de devenir le maître de votre mental.
Celui qui reste dans l’inquiétude n’a évidemment pas réussi. Même si vous vous rendez compte de la stupidité et de la futilité de cet étrange phénomène qu’est l’inquiétude ou l’angoisse, et que vous décidez de cesser de l’éprouver, vous ne parvenez pas à le faire. C’est le mental – votre maître – qui s’inquiète, pas vous.
Tout le monde a maîtrisé le mental jusqu’à un certain point. Étant donné cependant que cette maîtrise n’est pas totale, l’effet obtenu est le même que si l’on prétendait être le maître d’un chien qui ne mord que de temps en temps. De toute évidence, le mental refuse d’être maîtrisé ; il va vous résister dès le début. Reconnaître ce fait ici et maintenant est une indication que vous avez déjà commencé à vous engager dans la bataille, de par votre faculté de compréhension.
Parmi ceux qui débutent une pratique de méditation, il y en a peu qui réussissent vraiment. La raison en est qu’ils ne comprennent pas que le mental lui-même est le problème. Leurs méthodes, leurs systèmes et leurs instructeurs utilisent le mental pour vaincre le mental – c’est un exercice sans espoir.Dans la méthode que je vous propose, vous allez utiliser cette faculté supérieure qu’est votre compréhension, ainsi que quelques “trucs” pour inciter le mental à faire ce que vous voulez, alors même que vous allez de mieux en mieux comprendre quelle est sa nature. Le principe est simple : ce que vous comprenez, vous êtes en mesure de le contrôler.
La compréhension se révèle être la clé de cette méthode.
N’obéissez donc à aucune injonction de ce livre sans en avoir d’abord compris la raison, et sans avoir vérifié dans votre propre expérience si elle a ou non un sens. Si vous obéissez de façon automatique, vous êtes semblable à ces animaux dressés qui accomplissent une tâche sans en avoir compris la raison. Votre objectif est de devenir le maître – et tout maître est un maître parce qu’il ou elle comprend le sens de ce qui est accompli.