Méditations sur l’engagement

Il y a deux sortes d’engagement dans la vie, liés à deux sortes de choix :

  • les choix structurants (déménager, vivre seul ou avec quelqu’un, avoir des enfants ou non, choisir un métier ou un autre, etc…)
  • les micro choix de chaque instant (manger maintenant ou plus tard, se promener ou aller faire des courses, méditer ou bien aller faire quelque chose, sourire à cette personne ou bien éviter son regard, etc…)

l'engagement su scarabée

L’engagement vis-à-vis d’autrui

Il y a donc deux sortes d’engagement vis-à-vis d’autrui :

  • Les engagements de fond, l’engagement structurant, avec ou sans papiers administratifs, avec ou sans recours aux institutions :
    • acheter un bien immobilier à deux, s’associer, prononcer des voeux solennels, religieux ou maritaux, etc…
    • vivre ensemble sans contrat, travailler ensemble en partenariat sans besoin d’officialiser quoi que ce soit, etc… Mais parfois ce genre d’engagements libres et implicites sont encore plus impliquants que les autres.
  • L’engagement à l’instant présent, l’engagement de toute la présence dont on est capable, instant après instant. Alors, on peut ne pas être engagé sur le fond, tout en étant parfaitement disponible, présent, impliqué, engagé dans la relation, maintenant, instant après instant. C’est plus rare si on se place en comparaison de ce qui se pratique dans le collectif, mais sur le Sentier, c’est la norme la plus répandue, parce qu’on n’a moins besoin de l’arbitrage extérieur, et qu’on est très attentif à « maintenant » (ayant bien intégré qu’il n’y a que maintenant à vivre).

Parfois l’engagement structurant, l’engagement formel, l’engagement à grosse maille, non seulement ne garantit pas l’engagement de chaque instant, mais sert même de prétexte à ne pas s’engager dans l’instant.

 

Pourquoi ce manque d’engagement ?

Mais parce que l’ego se sent en sécurité du fait de la convention de façade, factice et superficielle comme tout ce qui relève du monde extérieur.

Du coup, l’être cesse sa vigilance et l’ego prend le dessus imperceptiblement.

  • Dans les vieux couples par exemple, qui sont engagés depuis longtemps sur le fond, ils peuvent n’être fidèles que par habitude, par éthique, ou par facilité et paresse, plus que par amour de chaque instant. Sont-ils heureux, sont-ils vibrants d’amour ? Pas toujours… Qui sait ce que leur relation serait devenue sans l’engagement de fond qui leur a permis de quitter la route de l’amour pour déraper dans celui de l’habitude ?
  • Avec des clients envers qui on est lié par contrat, on ne donne plus le meilleur de soi-même pour créer de la valeur, on se contente de respecter les normes prévues au contrat et on met toute son énergie dans la recherche de nouvelles opportunités avec ce client ou avec d’autres. Et c’est légal et honnête… Mais était-ce ce qu’on espérait et promettait ? N’est-on pas en risque d’éroder la relation de satisfaction mutuelle ?

 

Quand l’engagement favorise le non engagement…

Dans ces deux cas, on le voit bien, l’engagement contractuel de fond est ce qui permet ou induit à la longue le moindre engagement dans l’instant. autrement dit, parfois l’engagement de fond produit en partie le désengagement de l’instant, comme un effet de bord indésirable, mais bien réel et prégnant.

Cela dit, ce n’est pas obligatoire que l’engagement de fond contribue à dégrader l’engagement de l’instant. Il y a des exemples de couples qui s’aiment ardemment comme au premier jour, même après avoir traversé l’épreuve de la continuité et de l’habitude. C’est même au contraire pour certains, cette durée, et ces routines, qui auront parfois permis cette heureuse distillation des sentiments les plus forts et les plus fins… Mais, honnêtement, on en connaît beaucoup ? Autant que des couples de l’autre sorte ?

Autrement dit, ce fameux engagement auquel l’ego a tant besoin de se raccrocher pour pouvoir poser ses valises, et prendre appui sur une représentation solide (« ça y est nous sommes associés, ça y est le client a signé, ça y est nous sommes mariés, etc… ») est très souvent un « tue-l’amour » de première classe, un risque majeur pour l’engagement à l’instant présent.

Il n’est pour autant pas à éviter ou rejeter, mais il faut doubler de vigilance dès que les voeux sont prononcés, car c’est alors que le risque est le plus grand de ne plus les observer 🙂

Les deux formes d’engagement ne sont pas incompatibles. En fait, les deux devraient même converger et se renforcer mutuellement, même si ce n’est souvent pas le cas, hélas.

 

Pas d’autre choix que de s’engager

En fait, on peut gloser autant qu’on voudra à propos de l’engagement, il n’est pas une option, mais une obligation qui s’impose d’elle-même : on ne peut pas ne pas s’engager !

Expliquons-nous : Si on ne décide pas, la vie se charge de décider à notre place, car rien n’est figé, tout se transforme, avec ou sans notre participation volontaire et consciente. Tandis que vous lisez ces lignes, des dispositions ont été prises à votre insu, qui vous engagent (ou vous concernent) !

Que vous vous engagiez dans l’option A ou la B, ou bien que vous choisissiez de ne vous engager dans aucune des deux, dans les trois cas de figure vous serez engagé quelque part. Les non choix sont des choix et le non engagement est un engagement, chargé de conséquences lui aussi.

La question pertinente n’est donc pas de s’engager ou non (puisque le non engagement n’est finalement pas une option) mais bien plutôt à quoi faut-il s’engager ?

S’engager dans une grande décision ? Certainement, quand l’une d’entre elle se présente.

Mais surtout s’engager à chaque instant dans l’instant présent, pour être pleinement engagé dans la vie, en pleine présence, plutôt que rêver sa vie en pensant à toutes sortes de choses vaines, tandis que la vie passe sans vous.

 

Nous sommes nos choix, nous sommes nos engagements.

Si je m’engage dans un sport, par exemple en prenant un abonnement dans un club, me voici membre du club. A présent, je ne serai véritablement sportif, avec la condition physique qui va avec, que si je pratique le sport en question, et suis assidu aux séances proposées par ce club. C’est évident. Encore une fois, l’engagement qui compte, c’est celui de chaque instant. Car dans le fond : que je fasse du sport est plus important que de m’inscrire ou non dans un club, surtout si je n’y vais finalement pas, comme c’est souvent le cas : les gens prennent de bonnes résolutions… qu’ils ne tiennent finalement pas.

Autre exemple. Supposons que je me lance dans une séance de yoga, je peux « exécuter » des postures  de façon méthodique (qui, dans ce cas-là, seraient plutôt des « impostures »), pris par l’élan et les plis de l’habitude. Et dans ce cas, je ne suis pas ouvert, pas à l’écoute, je fonctionne en mode « pilote automatique », je peux même penser à diverses choses tandis que le corps est diversement malmené.

  • Je « conduis » alors ma séance dans le but de la conduire et d’en bénéficier des effets, au lieu de laisser les pauses infuser d’elles-mêmes.
  • En quelque sorte, au lieu de vivre simplement cette séance, je me représente en train de la vivre, comme un acteur jouant son rôle.
  • Je pratique dans la perspective d’un objectif, d’un effet recherché. « Grâce à la séance, je serai détendu, je serai assoupli, je serai tonifié, l’énergie aura été brassée, je disposerai de plus d’oxygène, de « prana », de concentration, ou de tout ce que vous voudrez.. ». Mais c’est un ajournement, une procrastination : je sacrifie l’instant présent au profit de l’instant d’après, chargé de mes attentes et projections.

Dans ces mauvaises conditions, je ne suis pas pleinement présent, à la gratuité de l’écoute. Je ne lâche pas prise, je contrôle. Au lieu de voir l’ego à l’avant-plan sans en être dupe, je me prends pour mon personnage en train de pratiquer de la spiritualité. Je suis convexe, cherchant quelque chose supposé venir après, au lieu de me laisser être trouvé maintenant… (Voir aussi cet article complémentaire : « Qu’est-ce que l’ego ?« )

Ces deux exemples illustrent bien que c’est l’engagement à l’instant présent qui prime. Toutefois, sans engagement sur le fond, on risque de ne pas se présenter sur le tapis, et ne pas s’adonner à la pratique (quelle qu’elle soit). Donc, encore une fois, les deux formes d’engagement sont complémentaires.

 

L’engagement sur la durée

Rien d’important ne se réalise, sans qu’on l’ait construit et entretenu dans la durée.

Dans la vie, pour être cohérent avec ses engagements, avec ses désirs, on sait tous qu’il faut une certaine régularité, et donc une certaine discipline. De cette discipline, jaillira d’elle-même une forme de liberté, qui émergera de la technique et de la pratique.

En revanche, la liberté ne jaillira jamais de la « routine » (prise dans son sens péjoratif, d’endormissement, de baisse de la vigilance). La technique et la pratique régulière sont là pour canaliser l’attention et la focaliser là où c’est nécessaire. Il ne faut donc pas qu’elles endorment la vigilance.

Toutefois une certaine dose d’automatisation est bienvenue, pour pouvoir asseoir les fondamentaux, se libérer des actes de base, et pouvoir enfin s’accorder aux subtilités, qui offrent les prises de conscience les plus fines et les plus fortes.

Tout est donc question de dosage entre discipline et liberté, entre régularité et inspiration, entre automatisation et authenticité. Il faut les deux, de même qu’il faut les deux formes d’engagement, comme nous l’avons déjà souligné.

 

L’engagement et les Voeux

L’engagement est une clé puissante pour déboucher sur le Sentier initiatique. D’où les voeux proposés par les religions…

Car, pour se libérer, il faut s’engager !

Mais pas n’importe comment. Sinon, ce serait contre productif : une forme de  contre initiatiion, en quelque sorte.

Dans un paragraphe remarquable de Terre Oméga, intitulé « Les trois Voeux », Jacques Breyer évoque magistralement ce thème de l’engagement. En voici le texte, à lire doucement, de façon fractionnée, en méditant entre chaque ligne. En laissant infuser les différents niveaux de sens superposés.

Comme vous allez pouvoir le lire (ou le relire), il  y évoque en préambule la nécessité de dépoussiérer la question de l’engagement de tout le poids du passé. En effet, les voeux traditionnels n’ont jamais été à prendre à la lettre, tandis que c’en est l’esprit qu’il s’agit de capter et d’incarner.

Après ce préambule nécessaire, pour classer les monstruosités induites par les carcans religieux mal interprétés, l’auteur évoque les trois voeux Chrétiens, à titre d’exemple, et en propose l’essence à bien entendre, pour ne pas se blesser avec.

Il s’agira ainsi de s’en inspirer pour se libérer, plutôt que de s’enfermer avec dans une citadelle artificielle, produite par le mental, qui renforce l’illusion d’un ego séparé.

 

« LES TROIS VŒUX ».

L’Etre humain, pour Avancer dans sa Sphère, profite naturellement de l’expérience fournie par son Passé.

Cette expérience est coutume, tant que rien de nouveau ne s’impose à la suite d’un précédent Degré.

Les coutumes forment la Tradition de Voie Humide, baptisée encore Tradition de Lune, et comme telle… tantôt Bonne , et tantôt Mauvaise. (Continuité).

Par contre, ce qui s’impose d’Autorité, à point nommé dans les Architectures (donc Vouloir accentué de l’Esprit), s’appellera ici Tradition de Voie Sèche… c’est-à-dire Solaire. (Discontinuité… du moins en apparence).

— Le Passé est un nitre ou salpêtre, un azote ou engrais, un retour vers l’argile (corps premier et dernier du régime Solide). Le Passé doit ainsi être tenu sous nos pieds, si nous voulons incarner un authentique Présent débouchant sur l’Avenir.

Le Passé est un « Humus », nourricier ou vampirisant. Suivant nos Caractères, le Passé peut nous conduire à la Spirale évolutive, sinon dans un Cercle infernal (pour ne pas dire : vicieux) dont bientôt les plus Faibles ne pourront plus sortir.

Par excellence Gardien du Seuil sur le Sentier, c’est toujours lui, le Passé, que le Néophyte rencontre tout d’abord. — Le Passé nous aime… et j’ajouterai qu’il nous aime terriblement, plus on devient Lucide ; car, en fait : il veut se Transcender par nous, et non pas que nous le prolongions dans ses débris ou Reflets… ce qui, malheureuse- ment, arrive à trop de gens. (Il faut donc, là encore, choisir entre la Lettre et l’Esprit).

— Un Homme, une Ecole, un Peuple, une Religion, sont Elus en Vérité de Dieu, tant qu’ils Apportent « la Suite » et en Témoignent ; mais une Descendance qui ne « Fournit » plus, est seulement couronnée de prétentions gratuites… tandis qu’elle se réfugie aussitôt, et inéluctablement, dans le culte idolâtre de ses Grands Disparus.

Ne pouvoir assumer un nouveau palier d’Accélération, indique qu’il faut aller noblement se coucher »… mais devant lui, prétendre s’agripper tout de même, devient atroce et hideux. Là se bauge une véritable hérésie, la plus condamnable qui puisse être au Regard du Principe, parce que de telles « cendres » attardant ainsi une Masse, l’empêchent en Dieu de réellement Evoluer.

Etudions par exemple, suivant la Lettre et l’Esprit, l’Utilité ou non des trois Voeux traditionnels, que sont : la Chasteté, l’Obéissance, et la Pauvreté ?

— Chasteté, Obéissance, Pauvreté, constituent le Ternaire fonda- mental de l’Offrande.

A présent, cette Offrande sera-t-elle « Reçue » ? Pas toujours ! — Souvenons-nous que les sacrificateurs intempestifs furent détruits ainsi que leurs autels.

Il y a l’Enfance et l’Age Adulte de l’homme devant l’Ascèse, pouvant donc être le vol d’Icare ou celui de Pégase.

Les Voeux sont une Ethique, avec un envers et un avers, gouvernés par « Janus ». Faut-il Spiritualiser la Matière (recherche Sacerdotale), ou Incarner l’Esprit (recherche Adeptale) ?

Trois questions sont ici à poser :

  • Faut-il mieux être chaste, ou Vierge devant Dieu… trêve de puériles continences, ?
  • Faut-il (ô vanité inconsciente) fièrement obéir sans chercher à Comprendre, ou bien oser humblement Réfléchir sur la Loi d’Equilibre dictée par la Sagesse ?
  • Faut-il ignorer la Matière pour se dire Pauvreté, ou plutôt la détenir au service de l’Esprit… tout en observant un total « non nobis », c’est-à-dire : « rien pour soi » ?

Par Corps, Âme, Esprit (donc par sexe, coeur, tête) — de même que par Voie Sèche et Voie Humide omniprésentes — le problème des trois Voeux est une citadelle aux étranges griseries, un repaire de chimères (capable de prodiges condamnables puisés aux refoulements), quand cette citadelle n’est pas, dis-je, enlevée de main de Maître.

Tableau :

  • — —, la mort va dans la Mort ; l’ascète qui ne Trouve pas.
  • + —, la vie va dans la Mort ; le jouisseur sans Lendemain.
  • — +, la mort va dans la Vie ; l’Ascète qui a Trouvé.
  • + +, la vie va dans la Vie ; l’Homme Libre et Incarnant l’Esprit.

Depuis des siècles, après tant de Voeux consentis (dont beaucoup à la Lettre), faut-il donc encore aujourd’hui (ère nouvelle) nous complaire dangereusement dans la répétition de sacrifices correspon- dant à une Marche désormais vécue… ou bien oser maintenant un autre Bond, succédant à ce Degré ?

« Qui n’avance pas, recule » ; l’Esprit doit se libérer de la Lettre, afin d’appartenir non pas à la dépouille mais à l’Intelligence de notre Genre humain.

… Tuteur du jeune rosier, frein sur les barbaries, la férule appliquée engendrera un « demeuré », si, après son utilité, on ne sait la remiser à temps pour ouvrir au Traitement suivant. (Progression Alchimique).

Consolateur des affligés, Dieu de la Haute-Science venant multiplier l’Amour, annonciateur de Parousie (cet Archétype en Gloire qui reviendra Juger dans l’instant où le ciel se roulera comme un livre »)… l’Heure est au Saint-Esprit Rénovateur, à son Eglise naissante devant unifier les Croyances au-dessus des clochers, face aux tribulations, en pleine Apocalypse chargée de nous filtrer.

Il est donc normal, en cet Age avancé, que soient démasquées les tentacules nuisibles de cet être diffus enfanté par nous tous qu’est l’anti-Christ actuel, Reflet de ce Rayon qui a Brillé jadis avec Eclat…(je veux parler du Courant Rédempteur, qu’il nous faut Retrouver en sachant Adapter).

— Qu’il y ait ou qu’il n’y ait pas un rempart de granit entre soi et la foule, il est surtout important qu’il y ait un cloître de Lumière intérieure entre nous et de terribles envoûtements.

Trop de Voeux perpétuels, contractés en « Enfance », n’engendrent finalement que des monstres durcis, ou des âmes déroutées attendant vainement quelques « Signes »… tandis que la vie passe, enfermée tristement aux plis de l’habitude. (Toute la question est de savoir : si dans la Chute Macrocosmique, nous, Microcosmes, nous devons nous laisser Boire, prisonniers d’une coque infernale… plutôt qu’observer un « non nobis » Adulte, seul capable de vaincre le Torrent ? )

Vivre sainement — être simplement soi — cultiver l’altruisme — n’est-ce pas « Pureté, Humilité, Désintéressement » que ce triple Engagement Secret ? — Enfin, n’est-ce pas, à l’Aube du Paraclet, faire sonner de manière Cristalline, ce que « Chasteté, Obéissance, et Pauvreté » ont fourni depuis des siècles comme holocaustes pour qu’il en soit ainsi ?

Voir nos commentaires à propos de ce texte.

 

L’engagement sur le Sentier

Le Sentier nécessite que l’on s’y engage.

Au début, on papillonne et c’est normal. On se disperse un peu, mais c’est parce qu’on cherche son élan et son inspiration.

Le passage du papillonne au véritable engagement sur le Sentier, c’est quand on réalise des plus intimement que la vie n’est pas quelque chose à réussir, mais qu’elle est une école, une proposition pour nous libérer de l’emprise de l’illusion et densifier la conscience.

Il y a un moment où consciemment et volontairement, toutes les forces de l’être convergent vers une prise de conscience suivie d’un engagement radical et à outrance : « Je désire ardemment m’éveiller à la claire Liberté, à vivre dans la Vérité ».

Toutefois, entre cette ferme résolution qui engage toute la vie (à la fois toutes les dimensions de l’expérience et toute la durée de la vie) et l’éveil véritable, il se passe souvent un certain temps.

Et on en a déjà parlé dans l’article dédié à l’allégorie de la caverne de Platon, entre l’éveil et sa pleine réalisation de la conscience, il se passe encore du temps.

Tout ceci ne se produit pas sans la participation consciente de soi-même. On ne peut pas subir l’initiation. On ne peut pas s’éveiller spirituellement, sans participation consciente et volontaire de l’esprit.

S’il convient par moments de se montrer concave et passif, il faut aussi se montrer actif et engagé ! Cela n’est pas assez dit. Et on se complaît trop souvent dans des « histoires à dormir debout », à propos de relaxation et de lâcher prise…

L’Unité tient le masculin et le féminin en équilibre. Il faut donc être actif et passif. Activement passif et passivement actif, si on veut s’amuser à être subtil… mais en aucun cas, laisser croire que le Sentier ne serait que passif. Cela serait plutôt l’anéantissement après la désertion, la seconde mort après le décès corporel, ponctuant une misérable vie larvaire.

Sur le Sentier il faut de la patience, de la constance et de la persévérance… D’où cet immense symbole égyptien du scarabée :

l'engagement su scarabée

 

L’esprit du Zen : engagement à l’instant présent

Christiane Singer a écrit de belles pages sur l’éloge de l’engagement (Éloge du mariage, de l’engagement et autres folies, éditions Albin Michel), auxquelles je vous renvoie. Cette belle femme, élève de Karlfried Graf Dürkheim, écrit de manière vibrante, car c’est une conteuse. Et elle a le mérite de s’être adonnée toute sa vie à la recherche de la justesse, instant après instant, à travers l’attention accordée au corps.

Entre le désir profond de se lier, de s’engager corps et âme, et le désir tout aussi profond de préserver sa liberté, d’échapper à tout lien, quel tohu-bohu ! Or, pour vivre ces exigences contradictoires et d’égale dignité sans être écartelé, il n’y a aucun secours à attendre ni de la philosophie, ni de la morale, ni d’aucun savoir constitué. Il est probable que les seuls modèles adaptés pour nous permettre d’avancer sont la haute voltige et l’art  du funambule.

Un mariage ne se contracte pas. Il se danse. À nos risques et périls.

Souvent la peur de l’engagement nous coûte cher et nous laisse errer « libre » certes, mais vide. Entre cette liberté si désirable et la relation vivante que notre nature appelle ardemment, le déchirement semble fatal. Je ne l’ai pas. Pourquoi notre rêve d’autonomie ne respirerait-il pas au coeur même de nos plus profonds engagements ? Pourquoi dans un respect mutuel de nos rythmes et de nos lentes métamorphoses, ne tenterions-nous pas une loyauté nouvelle ? Le mariage – et les alliances vieilles comme le monde – familles et communauté – qui volent en éclats aujourd’hui attendent d’être réinventées, modulées de neuf. Car en-deçà du bruit et de la fureur, l’histoire de notre humanité n’est qu’un lumineux tissu de solidarités secrètes.

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