Que faut-il demander lors d’une prière dirigée ?
Cette question est cruciale et subtile, quoi que la réponse soit potentiellement très simple, comme nous allons le voir.
« Le retour du Fils prodigue »
Il est une parabole de Jésus dans l’Evangile appelée « Le retour du Fils prodigue », dans laquelle Jésus raconte qu’un Fils ayant quitté son Père en lui demandant sa part d’héritage afin de pouvoir la dilapider, s’en revient un jour ruiné et est accueilli par ce dernier avec Joie qui lui offre tout, autant qu’à un autre de ses Fils qui n’est pourtant jamais parti, et à qui ceci paraît injuste…
11 «Un homme avait deux fils. 12 Le plus jeune dit à son père: ‘Mon père, donne-moi la part de l’héritage qui doit me revenir.’ Le père leur partagea alors ses biens. 13 Peu de jours après, le plus jeune fils ramassa tout et partit pour un pays éloigné, où il gaspilla sa fortune en vivant dans la débauche. 14 Alors qu’il avait tout dépensé, une importante famine survint dans ce pays et il commença à se trouver dans le besoin. 15 Il alla se mettre au service d’un des habitants du pays, qui l’envoya dans ses champs garder les porcs. 16 Il aurait bien voulu se nourrir des caroubes que mangeaient les porcs, mais personne ne lui en donnait. 17 Il se mit à réfléchir et se dit: ‘Combien d’ouvriers chez mon père ont du pain en abondance et moi, ici, je meurs de faim! 18 Je vais retourner vers mon père et je lui dirai: Père, j’ai péché contre le ciel et contre toi, 19 je ne suis plus digne d’être appelé ton fils, traite-moi comme l’un de tes ouvriers.’ 20 Il se leva et alla vers son père. Alors qu’il était encore loin, son père le vit et fut rempli de compassion, il courut se jeter à son cou et l’embrassa. 21 Le fils lui dit: ‘Père, j’ai péché contre le ciel et contre toi, je ne suis plus digne d’être appelé ton fils.’ 22 Mais le père dit à ses serviteurs: ‘Apportez [vite] le plus beau vêtement et mettez-le-lui; passez-lui un anneau au doigt et mettez-lui des sandales aux pieds. 23 Amenez le veau qu’on a engraissé et tuez-le! Mangeons et réjouissons-nous, 24 car mon fils que voici était mort et il est revenu à la vie, il était perdu et il est retrouvé.’ Et ils commencèrent à faire la fête.
25 »Or le fils aîné était dans les champs. Lorsqu’il revint et approcha de la maison, il entendit la musique et les danses. 26 Il appela un des serviteurs et lui demanda ce qui se passait. 27 Le serviteur lui dit: ‘Ton frère est de retour et ton père a tué le veau engraissé parce qu’il l’a retrouvé en bonne santé.’ 28 Le fils aîné se mit en colère et il ne voulait pas entrer. Son père sortit le supplier d’entrer, 29 mais il répondit à son père: ‘Voilà tant d’années que je suis à ton service sans jamais désobéir à tes ordres, et jamais tu ne m’as donné un chevreau pour que je fasse la fête avec mes amis. 30 Mais quand ton fils est arrivé, celui qui a mangé tes biens avec des prostituées, pour lui tu as tué le veau engraissé!’ 31 ‘Mon enfant, lui dit le père, tu es toujours avec moi et tout ce que j’ai est à toi, 32 mais il fallait bien faire la fête et nous réjouir, parce que ton frère que voici était mort et il est revenu à la vie, il était perdu et il est retrouvé.» Luc 15:11-32
- « car mon fils que voici était mort et il est revenu à la vie, il était perdu et il est retrouvé » sous-entend que l’esprit est comme « mort », lorsqu’il se croit séparé. Quand celui-ci entreprend le voyage de retour (en lui-même) vers la conscience de son Unité avec le père (comme la bague en or, se rend compte qu’elle est de l’or avant d’être une bague), alors il recouvre instantanément ses richesses, dont il se tenait lui-même à l’écart (car personne ne l’a obligé à quitter le Père). En fait, il n’y a pas de Père et de Fils, puisqu’ils sont Un. LE Fils reconnaissant le Père est le Père lui-même. C’est le Père dans le Fils, qui se reconnaît lui-même…
- « tu es toujours avec moi et tout ce que j’ai est à toi » : il n’y a donc rien à demander qu’on n’ait déjà !
Attention au matérialisme spirituel
Demander « quelque chose » (un objet séparé du sujet que nous sommes) reviendrait à poser la limite qu’on chercherait à combler. Il convient au contraire, de reconnaître que le désir lui-même est expression de Dieu et qu’il est déjà comblé, du fait même d’être reconnu dans la conscience. La croyance en le manque et la séparation est l’équivalent de l’exil hors de soi, tandis que la reconnaissance de l’Unité en soi est le retour à la Réalisation instantanée de la perfection qui ne nous a jamais quitté (dont le retour du Fils prodigue est finalement symbole de la conscience se reconnaissant enfin en tant qu’ Unité).
Cela se tient à un fil de rasoir près de basculer dans le matérialisme spirituel, consistant à ce que ce soit l’ego qui prie (pour se renforcer dans son illusion de séparation, finalement). Et on peut bien imaginer l’ego faisant sa liste de caprices au Père Noël, tel Aladin frottant superstitieusement une lampe à huile dans l’espoir de voir exaucés tous ses voeux les plus farfelus.
Affirmation impeccable (sans péché)
Très ressemblant à cela, mais aussi différent que l’est le rayon de son reflet, l’affirmation du soi, en soi-même :
« Je Suis ! ». Je suis le Fils dans le Père, provisoirement et superficiellement différencié mais profondément et éternellement Uni à Lui. Mon désir prolonge le Vouloir Existentiel de son Essence. Mon désir n’est que le Sien, devant lequel je m’efface, tout en m’engageant pleinement à sa Réalisation. Ainsi, je ne demande pas, mais « Je » décide (Dieu décide, en « moi » qui demande).
Alors que peut-on « demander » ?
Il n’y a rien à demander qui viendrait de l’extérieur combler notre pseudo vide intérieur. Et ce pour deux raisons :
- Nous ne sommes pas vides. La sensation de limite et de vide, vient de l’égo, cette fausse identité qui procède de l’illusion que nous serions séparés du Tout.
- Et quant aux objets extérieurs, ils ne sont pas « pleins » et ne peuvent en aucun cas remplir quoi que ce soit.
Il ne s’agit pas de « demander » quelque chose à une puissance extérieure, mais plutôt de « précipiter » en Soi (le Soi étant considéré ici comme étant le Tout) une manifestation, depuis l’intention jusqu’à sa matérialisation. La prière n’est plus dès lors une forme de misérable mendicité, mais l’exercice humble (car sans ego) de la responsabilité du Fils, au service du Père.
Dépasser la morale de 1er degré de Jakin
Cela étant dit, il n’y a pas de tabous à entretenir :
- Tous les désirs (à condition qu’ils ne nuisent à personne) sont légitimes, du simple fait d’être une manifestation pure et naturelle de la vie, émergeant dans la conscience et reconnus par elle.
- Et il n’y a pas non plus à ne pas oser créer (ou attirer) pour soi ce qui est ressenti comme un besoin pour s’accomplir. Quand on mange, on nourrit son corps, il n’y a pas forcément d’ego là-dedans. Et il en va ainsi pour tout.
Soit tout est ego, soi rien ne l’est !
Quand rien n’est ego, alors Tout est expression de l’Unité, y compris les désirs multiples, qui émergent à profusion de la Source infinie de créativité. Les fantaisies sont alors celles de l’être profond, qui manifeste l’Esprit Divin. Son expression pure est artistique, malgré les imperfections inhérentes à la forme. Les impulsions Divines sont reçues par le cerveau et un peu déformées par lui, mais cela n’a pas d’importance. Il est normal qu’il y ait des opacités dans la matière, mais il n’y a pas à s’en formaliser, car c’est naturel. Ce genre d’imperfections sont donc également divines 🙂